Le défi de l’accès aux soins en Afrique du Sud
L’Afrique du Sud fait face à un défi de taille : garantir à tous ses citoyens un accès équitable aux soins de santé. Malgré des efforts gouvernementaux, les inégalités persistent, alimentant un vif débat autour de la mise en place d’une couverture santé universelle. Cette réforme ambitieuse soulève autant d’espoirs que d’inquiétudes dans ce pays marqué par de profondes disparités socio-économiques.
Depuis l’avènement de la démocratie en 1994, l’Afrique du Sud a certes réalisé des progrès considérables dans le domaine de la santé publique. Pourtant, le système actuel peine encore à répondre aux besoins de la population dans son ensemble. Creusé par l’héritage de l’Apartheid, le fossé se creuse entre, d’un côté, une minorité nantie qui bénéficie d’infrastructures médicales performantes mais payantes et, de l’autre, une majorité défavorisée tributaire de structures publiques sous-financées et débordées. Un contraste saisissant qui appelle à repenser en profondeur le modèle sanitaire national.
Un accès universel longtemps promis
Depuis son arrivée au pouvoir en 2018, le président Cyril Ramaphosa a fait de l’instauration d’un régime d’assurance maladie universel l’une de ses priorités. Une promesse de campagne devenue un projet de loi ambitieux visant à garantir à tous un accès gratuit aux soins de base. L’idée ? Financer ce système par un prélèvement obligatoire sur les salaires des actifs et les bénéfices des entreprises.
Voici une vidéo relatant ces faits :
Si le principe séduit une partie de l’opinion publique, en particulier les plus démunis, la réforme n’en soulève pas moins de vives critiques. Ses détracteurs, issus notamment de la classe moyenne et supérieure, redoutent une dégradation de la qualité des soins privés dont ils bénéficient actuellement. Certains remettent également en cause la capacité de l’État à mettre en œuvre efficacement un tel chantier, à l’heure où le système public pâtit déjà d’importants dysfonctionnements.
Soigner un système public exsangue
Au cœur des préoccupations figure l’état préoccupant des infrastructures sanitaires publiques. Hôpitaux vétustes, pénurie criante de personnel soignant, lits d’hôpitaux occupés à près de 200%… Le manque criant de moyens se traduit par des listes d’attente interminables et des conditions d’accueil souvent indignes pour les patients les plus modestes.
Selon ses promoteurs, le futur régime universel permettrait de réinjecter les fonds nécessaires pour moderniser les équipements, recruter du personnel qualifié et délester des structures actuellement asphyxiées. Mais pour y parvenir, il faudra d’abord démontrer une réelle volonté politique et endiguer les phénomènes de corruption et de gaspillage qui gangrènent encore trop souvent la gestion des deniers publics.
La privatisation, un vent contraire ?
Dans le même temps, le gouvernement est confronté à la pression grandissante des opérateurs privés. Bien implantés en Afrique du Sud, ces groupes lucratifs ont fait du secteur médical un terrain de prospérité très rentable. Naturellement réfractaires à l’arrivée d’un système universel gratuit, ils n’hésitent pas à mobiliser leurs importants moyens financiers pour infléchir le débat public.
S’ils ne parviennent pas à faire avorter la réforme, ces acteurs privés pourraient néanmoins peser de tout leur poids pour en modérer la portée. L’hypothèse d’un système hybride, combinant un socle de base universel et un circuit privé complémentaire pour les plus aisés, semble pour l’heure la solution de compromis privilégiée par les autorités.
Surmonter les défis pour tendre vers l’équité
Au-delà des considérations économiques, la mise en place d’une couverture santé pour tous représente un indéniable progrès social et moral. En donnant les mêmes chances d’accès aux soins, quel que soit le niveau de revenu, l’Afrique du Sud réaffirmerait son attachement aux valeurs d’égalité et de justice, dans la lignée de l’héritage de Nelson Mandela.
Reste à surmonter les nombreux défis à venir, qu’ils soient d’ordre financier, organisationnel ou politique. Une lourde tâche qui décidera, au final, de la crédibilité et de l’effectivité de la promesse d’un accès universel aux soins pour chaque Sud-Africain, une promesse qui engage l’avenir même de ce pays si divisé.