Soudan : la guerre civile fait des victimes innocentes à Omdourman
Le dimanche 5 novembre 2023, un drame s’est produit à Omdourman, une banlieue de Khartoum, la capitale du Soudan. Plus de 20 civils ont été tués et d’autres blessés par la chute d’obus sur un marché, selon une ONG locale. Ce massacre est le dernier en date d’une guerre civile qui oppose depuis avril deux généraux rivaux pour le contrôle du pouvoir : Abdel Fattah al-Burhan, chef de l’armée, et Mohamed Hamdane Daglo, chef des Forces de soutien rapide (FSR), une milice paramilitaire. Ce conflit sanglant a déjà fait plus de 9 000 morts, selon une estimation de l’ONG Armed Conflict Location & Event Data Project (Acled), et a provoqué le déplacement de plus de 6 millions de personnes. Quelles sont les causes et les conséquences de cette guerre ? Quelles sont les perspectives de paix ?
Un coup d’État manqué à l’origine du conflit
La guerre civile au Soudan a éclaté le 15 avril 2023, suite à un coup d’État manqué contre le général al-Burhan, qui dirigeait le Conseil souverain, l’organe de transition mis en place après la chute du dictateur Omar el-Béchir en 2019. Le général Daglo, qui était le numéro deux du Conseil souverain et le chef des FSR, une ancienne milice janjawid impliquée dans le génocide au Darfour, a tenté de renverser al-Burhan avec le soutien de l’Égypte et des Émirats arabes unis. Mais al-Burhan a résisté avec l’appui de l’Arabie saoudite et du Qatar. Depuis lors, les deux camps se livrent une guerre sans merci pour le contrôle du pays, en utilisant des armes lourdes, des avions de combat et des drones.
Voici une vidéo relatant ces faits :
Une situation humanitaire catastrophique
La guerre civile au Soudan a eu des conséquences désastreuses pour la population civile, qui subit les bombardements, les exactions et les pénuries. Selon l’ONU, plus de 6 millions de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays ou vers les pays voisins, notamment l’Éthiopie, le Tchad et l’Ouganda. Plus de 13 millions de personnes ont besoin d’une assistance humanitaire d’urgence, notamment en matière de nourriture, d’eau, de santé et d’éducation. La situation est particulièrement critique au Darfour, où les FSR ont repris le contrôle de plusieurs villes et commis des massacres contre les civils. Le risque de famine est élevé dans cette région déjà ravagée par des années de conflit.
Une impasse politique et militaire
Malgré plusieurs tentatives de médiation internationale, notamment sous l’égide de l’Union africaine et de l’ONU, les belligérants n’ont pas réussi à trouver une issue politique à la crise. Les pourparlers qui ont eu lieu fin octobre à Djeddah, en Arabie saoudite, n’ont pas abouti à un cessez-le-feu durable ni à un accord sur les modalités d’une transition démocratique. Les deux généraux s’accusent mutuellement de violer les trêves et de torpiller les négociations. Sur le terrain, aucun des deux camps n’a réussi à prendre un avantage décisif. L’armée contrôle toujours une grande partie du sud et du sud-est du pays, tandis que les FSR dominent l’ouest et le sud-ouest. La capitale Khartoum est divisée entre les zones tenues par al-Burhan et celles occupées par Daglo.
Une urgence pour la communauté internationale
La guerre civile au Soudan représente un danger pour la paix et la sécurité régionales. Elle menace de déstabiliser les pays voisins, qui accueillent des millions de réfugiés et qui sont confrontés à leurs propres crises internes, comme l’Éthiopie, le Tchad ou l’Égypte. Elle favorise également la prolifération des groupes armés et des trafics illicites dans la région. Elle compromet enfin les efforts de développement et de démocratisation du Soudan, qui avait connu un soulèvement populaire historique en 2019 contre la dictature d’Omar el-Béchir. Face à cette situation dramatique, la communauté internationale doit redoubler d’efforts pour faire pression sur les belligérants et les amener à accepter un dialogue inclusif et une transition pacifique vers un régime civil et démocratique.