Le 26 juillet 2023, un coup d’État militaire a renversé le président élu du Niger, Mohamed Bazoum, et l’a placé en résidence surveillée avec sa famille. Le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), dirigé par le général Abdourahmane Tchiani, a pris le pouvoir et a promis une transition pacifique et démocratique.
Mais le 13 août, le CNSP a annoncé son intention de poursuivre Bazoum pour haute trahison et atteinte à la sécurité de l’État, suscitant des réactions contrastées au sein de la population et de la communauté internationale.
Un soutien populaire au CNSP
Selon plusieurs témoignages recueillis par les médias locaux et internationaux, une partie des habitants de Niamey, la capitale du Niger, approuve la décision du CNSP de traduire Bazoum en justice. Ils l’accusent d’avoir trahi le peuple nigérien en dilapidant les ressources du pays, en favorisant la corruption et en s’alignant sur les intérêts étrangers. Certains voient dans le coup d’État une opportunité de changer le système politique et de rétablir la souveraineté nationale.
Voici une vidéo en anglais relatant cette nouvelle :
Crime de haute trahison ? C’est exactement ce qu’il mérite, puisque ce monsieur a trahi le peuple nigérien, en essayant de mettre toutes les ressources du Niger à son propre compte. C’est inacceptable pour un président, a déclaré un résident local à MSN.
Nous avons aimé ce que Tchiani a fait parce que (le président Mohamed) Bazoum a trahi notre pays, il l’a vraiment fait, a renchéri une dame à The Sun.
Une accusation fondée sur des preuves ?
Le porte-parole du CNSP, le colonel-major Amadou Abdramane, a affirmé que le régime militaire avait rassemblé les preuves nécessaires pour poursuivre devant les autorités nationales et internationales compétentes le président déchu et ses complices locaux et étrangers pour haute trahison et atteinte à la sécurité intérieure et extérieure du Niger.
Il a ajouté que Bazoum était mis en cause suite à ses échanges post-coup d’État avec des hauts responsables ouest-africains et “leurs mentors internationaux”, que les dirigeants du soulèvement accusent de faire de fausses allégations et de tenter de faire dérailler une transition pacifique afin de justifier une intervention militaire.
Le CNSP n’a pas révélé la nature des preuves qu’il détient ni les noms des complices présumés de Bazoum. Il n’a pas non plus précisé quand et comment il comptait organiser le procès.
Une justice indépendante ?
Un obstacle sur la voie de ce procès pourrait être le système judiciaire lui-même, a prévenu le secrétaire exécutif du Réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire (un groupe local de défense des droits humains).
Le CNSP doit avoir toutes les preuves nécessaires avant de le remettre aux tribunaux, et remettre un président aux tribunaux signifie le destituer. Avec le coup d’État, la destitution est déjà faite, a déclaré Ali Idrissa à VOA.
Aujourd’hui, notre plus grande préoccupation est la nomination de ce ministre de la Justice, qui, à notre avis, ne garantit pas une justice libre, a-t-il ajouté.
Idrissa faisait référence à la nomination par le CNSP du colonel-major Djibrilla Hima Hamidou, dit Pelé, comme ministre de la Justice. Ce dernier est un ancien chef d’état-major de l’armée qui a été impliqué dans plusieurs coups d’État par le passé.
Une pression internationale croissante
La décision du CNSP de poursuivre Bazoum n’a pas contribué à apaiser la crise régionale. Au contraire, elle a suscité des critiques de la part de la communauté internationale, qui appelle à la libération et au rétablissement du président élu.
Dès le lendemain du coup d’État, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a donné au régime sept jours pour rendre le pouvoir à Bazoum ou menacé de recourir à la force, mais ce délai est passé sans action de part et d’autre. La semaine dernière, la CEDEAO a ordonné le déploiement d’une force en attente, mais il reste encore flou quand ou si elle entrerait dans le pays.
Le département d’État américain a également condamné le coup d’État et la tentative de poursuivre Bazoum, affirmant qu’ils ne contribuent pas à une résolution pacifique de la crise.
Le Niger est confronté à de multiples défis sécuritaires, économiques et sociaux, aggravés par la pandémie de Covid-19. Le pays a besoin d’une stabilité politique et d’un dialogue inclusif pour surmonter ces difficultés et renforcer sa démocratie.