Aujourd’hui, sous la direction d’Abiy, l’Éthiopie s’enfonce dans une crise politique et humanitaire qui menace la survie même de l’État fédéral. Des groupes ethniques dans diverses régions mobilisent des milices locales pour prendre parti dans la guerre en cours au Tigré et dans les régions environnantes. La guerre entre les forces rebelles du Tigré et les troupes gouvernementales alliées d’Éthiopie et d’Érythrée a été marquée par des massacres et des violences sexuelles.
Des milliers de personnes ont été tuées et maintenant des centaines de milliers sont menacées de famine. La nature ethnique des conflits n’est pas nouvelle. C’était évident en 17 ans d’autoritarisme et de guerre qui ont duré entre 1974 et 1991. Il a provoqué des explosions sporadiques de micro-guerres, opposant groupe ethnique contre groupe ethnique et région contre région. Le résultat fut la famine de 1984.
Une série de guerres
Ce cycle se répète pendant près d’un an de guerre entre deux agents armés aux noms apparentés, les Forces de défense du Tigré et les Forces de défense nationale éthiopiennes. Les spécialistes éthiopiens qui ont étudié ce phénomène cyclique craignent pour la survie d’une Éthiopie multiethnique. La crainte est qu’il y ait un état permanent de guerre ethnique.
Voici une vidéo en anglais parlant de la situation dans le pays :
Dans mon esprit, deux facteurs devraient sonner l’alarme sur la situation actuelle. L’un est la paralysie dans l’intervention pour mettre fin au conflit, à la fois au niveau international et à l’intérieur de l’Afrique. L’autre est la rhétorique du génocide qui s’est glissée dans le discours public. Ces deux facteurs rappellent trop le prélude du génocide rwandais de 1994.
Réponse de la communauté
Plus de deux décennies après le génocide au Rwanda, les réflexions publiées sur cette catastrophe empruntent un chemin familier. Ils se concentrent, naturellement, sur les causes profondes du génocide et la réponse internationale à celui-ci.
Sur le thème de la riposte, ils dénoncent la tiédeur de la communauté internationale. Il s’agit d’une description codée des États-Unis en tant que superpuissance et des Nations Unies en tant qu’organisation internationale mandatée. Ce récit met en lumière ce que cette communauté particulière de nations aurait pu faire, mais n’a pas réussi à faire, pour arrêter le massacre après qu’il ait commencé.
Cette approche analytique du génocide au Rwanda suppose que les pays africains sont soit incapables, soit pas du tout responsables, de résoudre les problèmes de leur voisinage. Ou, pire, que seuls les États-Unis ou l’ONU sont responsables ou capables d’arrêter le génocide où qu’il se produise. Cette hypothèse surestime la capacité ou la volonté des deux d’assumer cette immense responsabilité. Il sous-estime également les obligations des communautés locales de devenir les gardiennes de leurs quartiers.
Obligation de prévenir
L’implosion de l’Éthiopie mettrait toute la région de l’Afrique de l’Est en péril. Cela menacerait le siège de l’Union africaine, qui est actuellement Addis-Abeba. Cela ternirait l’image de l’Afrique ainsi que celle d’une nation qui a un lien historique unique avec le droit international. L’Éthiopie a été la première nation à signer la Convention des Nations Unies sur le génocide et à s’associer aux idéaux de paix et de prévention du génocide.
Il n’est pas trop tard pour que les dirigeants éthiopiens et tous les Éthiopiens réfléchissent à la promesse du passé moral de l’Éthiopie et aux obligations de son présent : une obligation d’empêcher que la situation actuelle au Tigré ne dégénère en un génocide.