Début 2021, une année qui a été marqué par les expositions. Cependant, Dalila Dalléas Bouzar, l’artiste franco-algérienne est néanmoins présente un peu partout dans l’Hexagone, offrant plusieurs opportunités de découvrir un travail à la fois sensuel, exigeant et engagé.
Ses toiles sont exposées à Bordeaux au Frac Nouvelle Aquitaine et à l’Association Föhn qui proposera prochainement des visites guidées de l’atelier bordelais de l’artiste. Parmi ses œuvres les plus remarquables figurent sa vaste tapisserie Adama, créée en 2019 et présentée dans le cadre de l’exposition Love… au musée Bargoin de Clermont-Ferrand, ainsi qu’une série de peintures récentes qui sont conservées à la Cécile, Galerie Fakhoury à Paris.
Bouzar est né en 1974 à Oran et vit aujourd’hui à Bordeaux. La peinture est sa passion, elle l’utilise à la fois sur et hors de la toile dans des performances où son propre corps et celui de ses modèles deviennent des réceptacles de couleur.
Un moyen de se faire entendre
On assiste aujourd’hui à un retour discret de la peinture réaliste. Malgré cela, Bouzar a décidé de l’utiliser comme une arme pour déconstruire le discours dominant.
Voici une vidéo présentant cet artiste :
Dans le catalogue Innocent, qui accompagne sa deuxième exposition personnelle et a été écrit par la galerie Cécile Fakhoury, l’artiste a déclaré à la chercheuse Elsa Guily qu’utiliser la peinture à l’huile, même médium que les peintres orientalistes, mais aussi la technique par excellence du classicisme, c’est un choix stratégique qui me permet de revenir à la source de cette construction historique du discours occidental sur l’art. Les Femmes d’Alger de Delacroix, comme la campagne photographique de Marc Garanger pendant la guerre d’Algérie, qui a inspiré ma série Princesses, soulèvent à la fois la question de la double soumission au colonisateur et au patriarcat.
La série Princesses, qui met en valeur la dignité de la femme algérienne, fait partie de l’exposition Memoria: Tales from Another History. Cependant, il serait faux de prétendre que l’artiste ne traite que du passé colonial. Pour créer sa tapisserie Adama, qui représente, entre autres, les trois âges de la femme, Bouzar a travaillé avec des brodeuses algériennes spécialisées dans la confection de karakou, une veste traditionnelle portée par les mariées.
Des femmes libres
Plusieurs tableaux de la série Witches sont présentés ici, dans le décor très «white cube» d’un appartement lumineux du centre de Paris. Le titre fait référence à l’Inquisition, une époque où les hommes avaient tellement peur des femmes puissantes qu’ils les ont brûlées vives.
Ce sont des femmes normales que j’ai voulu remettre dans la totalité de leur existence, au-delà de cette période de 15 à 45 ans, où elles seront disponibles pour la reproduction.
Si la lecture politique de l’œuvre en cours est évidente, il serait dommage de s’en tenir à elle, tant les peintures sont si séduisantes dans leur matière et leur manière. Coloriste et dessinatrice hors pair, elle parvient à capter la palpitation de l’existence, la vie même au-delà de cette peau si souvent érigée en barrière.
“Crédit photo http://afsacsa.com/”