Après une saison pluvieuse généreuse, le Grand Barrage de la Renaissance en Ethiopien (Grand Ethiopian Renaissance Dam – GERD), établi sur le Nil Bleu, a atteint son niveau de remplissage le 22 juillet dernier. Les Ethiopiens ont célébré cette annonce comme une grande victoire, en faisant abstraction des objections et du mécontentement de leurs voisins égyptiens et soudanais.
Célébration nationale du remplissage du Grand Barrage de la Renaissance en Ethiopie
Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a fait l’annonce à l’adresse du peuple éthiopien par le biais d’un communiqué officiel relayé le 22 juillet 2020 à la chaîne télévisée de l’Etat. Le Grand Barrage de la Renaissance en Ethiopie a enfin atteint son niveau de remplissage. Cette nouvelle a été merveilleusement accueillie par la population. Les rues de la ville ont pris un air de fête nationale qui réunit les partisans et les opposants au régime. Les dirigeants disposent, en effet, du plein soutien du peuple dans ce projet colossal qui renforcera le développement économique de l’Ethiopie, un pays en pleine émergence.
Avec ses 175 mètres de haut pour 1 800 mètres de long, le GERD, construit sur le Nil Bleu, à un emplacement stratégique, constituera le plus grand barrage hydroélectrique du continent africain. La centrale devrait fournir une puissance installée de plus de 6 400 MW. Cette production d’électricité est très largement suffisante, voire excessive, pour couvrir les besoins du pays. Ainsi, L’Ethiopie prévoit de devenir le premier exportateur d’énergie en Afrique, en revendant l’excédent aux Etats voisins (Somalie, Djibouti, Kenya).
Les craintes de l’Egypte et du Soudan
De leur côté, bien loin des réjouissances populaires, les pays situés à l’aval, à savoir : l’Egypte et le Soudan, interpellent quant aux conséquences écologiques et sociales du GERD.
Les voisins de l’Ethiopie craignent que la rétention d’un volume démesuré d’eau au niveau du GERD n’entraine une baisse significative des débits qui alimentent les eaux douces sur leur territoire. En effet, 90% de l’eau douce destinée à la consommation et à l’irrigation des cultures en Egypte proviennent du Nil Bleu.
En 2019 des enquêtes sur les impacts du GERD sur les pays voisins sont entamées. L’avancement de ces études a été entravé par les vifs désaccords entre les trois pays concernés. En octobre 2019, les discussions sont tendues entre Adis Abeba et Le Caire. L’Egypte se positionne sur un remplissage s’étalant sur une quinzaine d’année afin de disposer de la garantie d’un débit de 41 milliards de m3 par an. L’Ethiopie, qui souhaite précipiter le remplissage du barrage afin de pouvoir bénéficier au plus vite des retombées économiques, s’arrête sur un débit de 30 milliards de m3. Les négociations s’éternisent. L’annonce du remplissage du GERD pour la première année de production atteste clairement d’une prise de décision unilatérale de l’Ethiopie d’accélérer le projet, malgré les mésententes.
Les tests des deux premières turbines sont prévus, en vue d’une première production d’électricité au début de l’année 2021.
La concrétisation d’un projet controversé
Pour rappel, la construction du Grand Barrage de la Renaissance en Ethiopie (GERD) a commencé le 2 avril 2011. Le projet qui a coûté près de 4,8 milliards de dollars a été entièrement confié à la société de construction italienne Salini Costruttori.
Le projet d’édification et de remplissage du GERD a failli tomber à l’eau face à la problématique environnementale. Cet enjeu a notamment valu le retrait de l’ensemble des bailleurs de fonds et des contributeurs internationaux. L’Ethiopie a, donc, pris entièrement en charge le financement du projet. La Chine a affirmé son souhait d’apporter son aide à hauteur de 1,8 milliards de dollars à allouer aux turbines et aux systèmes électriques. Djibouti a également participé en payant 1 millions de dollars.